Réflexion inspirée par le livre "Addiction générale"
de Isabelle Sorente
- - - - - -
1 - Séisme du Japon et accident de la centrale nucléaire de Fukushima
La radioactivité est invisible et imperceptible, globale et sans limites – elle ne connaît pas les frontières des états -, et ses conséquences sur la santé ne se voient qu’à long terme.
Est-ce que le fait qu’elle ne soit pas quantifiable est de nature à conforter ou à relativiser la conscience que nous avons qu'elle représente un danger magistral pour l’humanité d’aujourd’hui, et l’avenir de nos enfants ?
Après les désastres atomiques d’Hiroshima, de Nagasaki, et nucléaires civiles de Tchernobyl et de Fukushima : en quoi les chiffres pourraient-ils contribuer à résoudre la question de la responsabilité des hommes pour l’avenir de l’humanité et de la planète ?
Quelle est la mesure de l’incommensurable dans l’irresponsabilité ?
Faut-il créer une toise pour mesurer les conséquences de l’insuffisance des mesures de sécurité dans le fonctionnement d’une centrale nucléaire ?
Nous vivons dans une économie malade de l’optimisation des coûts obsessionnellement « optimisés », c’est-à-dire réduits pour parvenir à une économie de moyens et de dépenses, en fonction d’une probabilité qui exclut l’hypothèse de « l’impossible » parce qu’inimaginable, impensable.
N’est-ce pas justement l’impensable - l'accident nucléaire majeur - qui conduit à la folie d’une prise de "risque universelle majeure" aussi peu probable soit-elle ?
Quelle est l’unité de mesure quantifiable qui permettrait d’évaluer l’erreur – la faute universelle - qui a consisté à bâtir une telle installation nucléaire en bord de mer, en minimisant de manière démesurée la probabilité d’un séisme de grande magnitude suivi d’un tsunami tel que celui qui a dévasté le nord du Japon ?
Faut-il inventer un étalon pour mesurer la souffrance des familles endeuillées, pour autant que le nombre de morts connus soit de quelque utilité que ce soit ; et pour les blessures infligées aux victimes d’aujourd’hui et de demain, au Japon et ailleurs, par de telles catastrophes humaines consécutives à de telles catastrophes naturelles ?
Pour ne citer que cet aspect humain là, du désastre.
Le chiffre ne serait-il pas en définitive un instrument pour justifier la nécessité du rebond, du rassemblement d’un peuple autour de la reconstruction. Une sorte de rite tenant lieu de discours quasi magique sur la catastrophe, pour faciliter le deuil d’un peuple sous la forme d'un "il faut bien passer outre "- et réconforter l’humanité, pour unir dans l’oubli du traumatisme – et de la chaîne de responsabilités.
Le chiffre ne serait-il - pas alors le substitut de la parole pour éviter la contrainte morale d'avoir à nommer l’innommable : esquiver l’injonction contradictoire entre le devoir de dire, et l’impossibilité de dire la faute politique, industrielle universelle majeure ? Dont le prix n'a pas de prix.
- - - -
La dernière crise financière majeure de l’économie mondiale a été chiffrée, et les causes du collapse boursier ont été analysées; ses mécanismes et ses responsables sont connus.
Ont-elles donné lieu à une réforme fondamentale du système financier ?
Le chiffre n’est-il pas au fond un vernis rationnel et scientifique instrumentalisé pour légitimer a posteriori la catastrophe et l’annonce de sa répétition ?
Car en croyant savoir assez de la catastrophe, nous avons finalement appris à vivre avec elle, et les chiffres en apportant l’illusion de la connaissance, ont concouru à la résignation – reddition - de l’humanité face aux pleins pouvoirs de la finance globale.
NB : la toise est une unité de longueur ancienne. Elle correspond toujours à six pieds, soit deux verges ou une aune et demie. La toise est également un instrument de mesure.
- - - -
2 - Il y a moins de musulmans en France aujourd’hui qu’en 1905
(…)
La dernière étude en date, parue en octobre 2010, émane de l'Institut national des études démographiques (Ined) et de l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee). Selon les deux organismes publics, la France compte 2,1 millions de «musulmans déclarés».
Il y a moins de musulmans aujourd'hui qu'en 1905. Un rapide calcul l'illustre: le recensement de 1906 se base sur une population française de moins de 40 millions d'habitants, dont 10% de confession musulmane, soit environ 4 millions. Le ministère de l'Intérieur avance 5 à 6 millions de musulmans sur près de 67 millions d'habitants, soit, environ 8 à 9% de la population totale.
(…)
Est-ce que le fait de connaître le nombre exact de musulmans en France signifie un danger pour les français ?
Corollairement : est-ce que le fait de connaître le nombre exact de catholiques constitue un facteur rassurant pour les français ?
Le nombre n’est-il pas le voile derrière lequel se dissimule l’intolérance ?
J’ai dit
Plume Solidaire
commenter cet article …