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20 juin 2015 6 20 /06 /juin /2015 16:54
L'avaleur de serpent

L'avaleur de serpent

Avaler des couleuvres est le lot de tout un chacun.

L'écrivain public en avale aussi quelques unes.

Parfois, dans un sursaut de lucidité, il est possible de s'en prémunir, ou de clarifier une situation pour mettre un terme à une relation que nous pressentons un peu instrumentalisatrice à notre endroit.

La question qui se pose en arrière-plan est celle de l'intention.

Voici mon histoire avec Ayo, qui j'en suis convaincu a agi avec une certaine naïveté, et je le suppose un peu, par un excès de confiance dans les pouvoirs de sorcier qu'il devait peut-être me conférer.

En tout état de cause, c'est ainsi que préfère voir les choses.

Vieux singe certes, sorcier pourquoi pas, avaleur de couleuvre le moins possible.

 

- - - - - - - - - - -

 

Ayo est un prénom ivoirien – que j’ai trouvé pour la circonstance de cette chronique –, qui signifie Joie.

J’ai reçu Ayo à plusieurs reprises. Jeune et célibataire, il vit dans un foyer de notre arrondissement. C’était un garçon calme et attachant, anxieux mais convainquant et persévérant.

Pôle Emploi lui réclamait en octobre 2014 le remboursement d’un trop-perçu proche de 7 000 € d’Allocation Spécifique de Solidarité pour une période couvrant presque trois ans (33 mois), au motif qu’il était salarié pendant cette période. Ayo prétendait qu’il y a eu une erreur d’identité et qu’il s’agissait d’un tiers qui porte les mêmes prénom et nom que lui.

Pour qui connaît un peu l’Afrique, ses africains, et les problèmes que posent un patronyme identique pour un grand nombre de personnes ainsi qu'aux organismes sociaux, l’argument d’Ayo me paraissait plausible.

A sa demande, j’écris à l’entreprise pour demander une attestation certifiant qu’il n’y avait jamais travaillé. Il affirmait alors, comme je l’indique dans le courrier ci-dessous, s’y être rendu pour se faire remettre ce document en mains propres. Et il lui aurait été répondu qu’il lui sera adressé par voie postale.

Sans réponse de l’entreprise, je lui propose de solliciter l’intervention du Délégué du Défenseur des Droits, et je rédige le courrier qui suit. Quelques jours plus tard, ce dernier me contacte et m’indique que Pôle Emploi, qui n’est pas une administration publique, sort du champ de ses compétences. Toutefois il consent à intervenir à titre dérogatoire auprès d’une personne qu’il connaît à titre personnel.

C’est au cours de ce contact téléphonique qu’il m’informera que, en réponse à mon observation concernant les modalités de contrôles rétroactifs des allocations, si les organismes attributaires les effectuent aussi longtemps après les versements, c’est par manque de personnel.

Ayo persistant dans sa démarche, insiste habilement pour je contacte personnellement l’entreprise, pensant peut-être que mon aura de patriarche local des écritures publiques serait des plus efficientes pour obtenir cette pseudo attestation de "non emploi". J’y consens à condition qu’il me promette sur le champ qu’il ne me ment pas.

Il promet. Il confirme droit dans les yeux.

Le lendemain, aux heures de travail, je saisis mon téléphone, décidé à clarifier cette situation. Pour les besoins de la cause je m’improvise avocat. J'usurpe ma qualification pour m'assurer d'entendre le patron.

La personne qui reçoit mon appel me transmet immédiatement le PDG de l’entreprise, auquel je me présente en qualité de défenseur de M Ayo.

J’expose la situation d'Ayo, et je m’entends répondre : « Nous connaissons très bien M Ayo … ; il a travaillé longtemps dans notre entreprise. Il était l’un de nos salariés de 2010 à fin 2012. Nous avons adressé au Pôle Emploi les copies des fiches de paie de la période correspondant au trop-perçu  ».

Je présente mes excuses pour le dérangement, je précise que je ne suis qu'écrivain public bénévole et pas avocat. Je raccroche confus et déconcerté, mais néanmoins satisfait d’avoir clarifié cette affaire.

Ayo a menti.

Je n’ai jamais revu Ayo.

Cochon qui s'en dédit, oui. Mais stratégie de misère et tactique du pauvre, Ayo est bien plus à plaindre qu'à blâmer, et s’il revient, je lui ferai ses courriers.

Je serai bien curieux de savoir comment va rembourser son trop-perçu*.  Depuis qu’il ne perçoit plus l’ASS et se trouve sans ressource.

Intuitivement, j'ai le sentiment que le but de Pôle Emploi consiste avant tout à radier les fraudeurs insolvables, au moins pour la durée que représente le montant de leur dette qui, dans la mesure où ils demeureraient sans emploi (déclaré car il faut bien vivre), serait ainsi annulée. 

 

Plume Solidaire

*210 € pendant 33 mois, auquel s’ajoutent 850 € de frais d’huissier de justice.

 

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M. ………………

Foyer …………

Chambre ……… – BAT

………………………………

75019 PARIS

 

PÔLE EMPLOI ILE-DE-FRANCE

POLE EMPLOI ARMAND CARREL

44 rue Armand Carrel

75019 PARIS

 

 

Paris le 14 février 2015

 

 

OBJET : demande de remboursement de trop perçu de l’ASS

Numéro identifiant : …………….

Numéro dossier ….

Numéro de créance ……………..

 

Madame, Monsieur,

 

En raison de mes difficultés de lecture et d’écriture, je suis contraint de faire appel aux compétences d’un écrivain public.

 

Par courrier du .. octobre 2014 vous me réclamez un trop perçu d’Allocation Spécifique de Solidarité d’un montant de 6953,40 €.

 

Je me suis rendu dans les jours qui ont suivi dans vos services pour vous informer que je n ‘ai jamais travaillé dans cette entreprise. Les périodes d’emploi – du 10/3/2010 au 30/11/2010 et du 1/12/2011 au 30/11/2012 -, qui motivent votre demande de remboursement, concernent une personne qui m’est inconnue.

 

A votre demande, je me suis déplacé début novembre, auprès de la société ……………………… – 75010 Paris, pour demander une attestation confirmant que je n’ai jamais été salarié dans cette entreprise. J’ai pu m’entretenir avec la comptable, celle-ci s’est engagée à me faire parvenir cette attestation. Ce document ne m’ayant pas été adressé après trois passages dans cette entreprise pour rappeler ma demande, et trois promesses orales réitérées, j’ai adressé un nouveau courrier par lettre recommandée avec accusé de réception  le 13 février.

 

J’ai reçu la Signification de contrainte du .. décembre 2014, qui m’a été transmise par Huissiers de Justice, pour un montant de 7 803.66 €.

 

Je vous rappelle que je suis en recherche d’emploi, que l’ASS – 480 € par mois - constitue mon unique ressource, et que son montant est bien trop modeste pour que je puisse me permettre d’envisager son remboursement.

 

Par ailleurs, je me permets de vous exprimer mon étonnement, au constat que vos services ne soient pas en mesure de contrôler la validité des versements aux demandeurs d’emploi dans des délais raisonnables, pour que les ayants-droits à ces allocations demeurent en situation de solvabilité concernant les trop-perçus qui leur sont réclamés.

 

A cet égard, il me semble que, compte tenu de l’importance de la somme réclamée, il serait justifié que votre administration apporte elle-même la preuve de l’omission involontaire ou frauduleuse des déclarations du demandeur d’emploi.

 

En conséquence, je demande l’annulation de cette créance qui ne me concerne pas.

 

J’attire votre attention sur le fait que j’ai décidé d’informer le Délégué du Défenseur des droits de ma situation, et de lui transmettre mon dossier en sollicitant sa médiation en vue de l’annulation de cette créance non fondée.

 

Dans l’attente d’une décision favorable à ma requête, je vous prie d’agréer, Madame, Monsieur, mes salutations respectueuses.

 

 

 

 

 

PJ : copies

  • Courrier du 13 février 2015 à la société ……………
  • Signification de contrainte du .. décembre 2014
  • Courrier Pôle Emploi du ..octobre  2014

 

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